On pense souvent qu’au Moyen Âge, l’école était réservée à la noblesse ou aux enfants de la haute bourgeoisie. C’est vrai pour ce qui est de l’enseignement des humanités et des lettres, en particulier du latin et du grec, mais il existait aussi de nombreuses écoles plus adaptées aux besoins de la société de l’époque. Par exemple, les enfants de commerçants ou d’artisans pouvaient étudier dans des écoles dédiées à l’apprentissage du calcul et des disciplines techniques. En Italie ces écoles, appelées « écoles de boulier » ou « écoles d’abaque » (« scuola d’abaco ») furent très populaires à partir du XIIIe siècle. Elles jouèrent un rôle essentiel dans l’introduction de la numérotation indo-arabe. Ce système, originaire de l'Inde vers 400 avant J.-C. et adopté plus tard par les Arabes, était plus simple et plus pratique que d'utiliser le système de numérotation romain traditionnel existant. Ces écoles furent aussi un des ferments de la Renaissance et restèrent très actives jusqu’au XVIe siècle.
Au XVe siècle Léonard de Vinci fréquentera une « scuola d’abaco » située non loin du domicile paternel à Florence et, plus tard, le génie polymathe aux connaissances universelles se présentera volontiers comme un « homme sans lettres », disciple de l’expérience et de l’expérimentation.
Le boulier, ou abaque, était un dispositif composé de billes mobiles sur des tiges, chacune représentant une valeur numérique. Les élèves apprenaient à déplacer les billes sur le boulier pour effectuer des opérations d'addition, de soustraction, de multiplication, de division et d'autres calculs mathématiques. C'était un outil essentiel pour faciliter les calculs rapides et précis sans recourir à la notation écrite. Dans les écoles d’abaque, les maîtres apprennent aux élèves l'utilisation du boulier et les techniques de calcul associées.
Piero Vecchia : leçon de géométrie dans une "scuola d’abaco"
F gravure sur bois de Gregor Reisch
(in Margarita Philosophica)
Dans les villes marchandes italiennes, telles que Florence, Venise, Gênes et Pise, le commerce et les échanges est alors au cœur de l'économie. Au-delà de l’apprentissage de l’usage efficace du boulier, les maîtres mettent l'accent sur la résolution de problèmes concrets que les élèves rencontreront dans le monde professionnel.
Les futurs marchands étudient la comptabilité, les méthodes de conversion de devises, les calculs de pourcentages et d'autres compétences essentielles pour les activités commerciales Les artisans et les artistes apprennent la géométrie et les savoirs techniques nécessaires à leur art. Les artisans sculpteurs apprenaient par exemple à élaborer des échafaudages et des engins de manutention pour installer une sculpture de plusieurs tonnes en haut d’un édifice. Cet enseignement sera la source de beaucoup de progrès techniques qui conduiront, par exemple, à l’installation, en 1472, de la sphère de cuivre au sommet du Dôme de Florence.
enseignement de la géométrie
Le Duomo de Florence avec sa sphère au sommet
Santa Maria del Fiore
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