La Bataille de Roncevaux : entre mythe et réalité

Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 

 

En 778, Charlemagne part dans le nord de l’Espagne pour soutenir Souleiman al-Arabi le gouverneur musulman de Barcelone qui s’est révolté contre le calife de Cordoue et qui lui propose de reprendre Saragosse.

Saragosse constitue un réel enjeu militaire et économique car elle permet de contrôler l’Èbre. Toutefois, pour Charlemagne, c’est surtout une enclave de confession chrétienne dans un territoire alors sous domination musulmane. Par ailleurs Charlemagne entend aussi venir en aide à son vassal, le Duc de Gascogne dont les terres s’étendent de la Garonne jusqu'au sud des Pyrénées avec notamment Pampelune qui est convoité par le clan des Banu Qasi, des wisigoths islamisés.

C’est donc avec deux armées que Charlemagne traverse les Pyrénées. L’une va rapidement prendre possession de Pampelune. Avec l’autre, Charlemagne, après avoir sécurisé Barcelone, fait route vers Saragosse avec Souleiman à ses côtés. Arrivés à Saragosse, ils se heurtent à El Hussayn, qui bien que sous l’autorité de Souleiman, refuse d’ouvrir les portes de la ville aux Francs. Charlemagne, qui n’est pas en mesure de mener un siège , décide alors de ne pas s’attarder à Saragosse et d’aller plutôt au secours de Pampelune que les Banu Qasi viennent d’occuper. Charlemagne a alors vite fait de rétablir son autorité sur la ville.

la mort de Roland à Ronceveaux

Les Francs  affrontant des Sarrasins à Ronceveaux,
(miniature des Grandes Chroniques de France)

La mort de Roland, enluminure de Jean Fouquet
(extraite des Grandes Chroniques de France,)

Ganelon écartelé

Ganelon écartelé : miniature extraite d'un manuscrit
Grandes Chroniques de France,

Reprenant le chemin de la France via les Pyrénées, l’armée franque va subir, le 15 août 778, une embuscade au col de Roncevaux, situé à une cinquantaine de kilomètres de Pampelune. Les assaillants sont des Vascons, les basques de cette région. Ils veulent se venger des Francs accusés d’avoir profité de leur passage à Pampelune pour piller la ville. L’arrière-garde de Charlemagne est commandée par Roland  (Hruodland en francique), dit Roland le Preux,  préfet de la marche de Bretagne, qui s'est illustré pour  défendre la frontière du royaume des Francs contre les Bretons. L'armée de Roland est anéantie : tous ses soldats sont tués, non seulement Roland lui-même, mais aussi Anselme de Haspengau, le comte du palais de Charlemagne, et Eggihard, le sénéchal du roi.  Bien que mortellement blessé, Roland parvient à sonner si fort de l’olifan que Charlemagne est alerté du danger et revient en hâte pour venger ses chevaliers et mettre les basques en déroute

Charlemagne pleurant les morts de la bataille de Ronceveaux

Charlemagne pleurant les morts de la bataille ;
enluminure du XIVe siècle.

La bataille de Roncevaux est un vrai désastre mais les chroniqueurs vont réussir à faire oublier cette réalité pour que l’Histoire ne retienne que le courage et le sacrifice de Roland.
Trois siècles après la bataille de Roncevaux, une chanson de geste, la Chanson de Roland, va sublimer encore davantage le héros et faire une épopée de sa malheureuse aventure.

Écrite vers l’an 1100, par un auteur inconnu, la Chanson de Roland comporte 4000 vers.  Les troubadours l’étoffent au fil des années et des croisades. Le poème contient 9000 vers à la fin du 13e siècle.

Dans la Chanson de Roland, la poignée de basques de Roncevaux est devenue une puissante armée de Sarrasins, informés par le traître Ganelon du passage de Roland dans un défilé étroit des Pyrénées. Roland est quant à lui devenu le neveu de Charlemagne. La chanson raconte comment la trahison de ganelon permet aux infidèles de tendre un guet-apens aux chrétiens. Elle met en avant le courage des valeureux chevaliers et fait de Durandal, l’épée de Roland, le symbole de la bravoure.  Surpassés en nombre, les chrétiens se battent héroïquement et infligent de lourdes pertes à l'ennemi avant de tous succomber. Roland est le dernier à se battre. Mortellement blessé, il alerte Charlemagne avant que l’archange Gabriel n’emporte son âme au paradis. Charlemagne, appelé trop tard, venge les chevaliers et met les Sarrasins en déroute. Il fait aussi juger Ganelon qui est condamné à mourir écartelé.  De retour à Aix La Chapelle, Charlemagne annonce à la belle Aude, la fin tragique de son fiancé: elle s'effondre aux pieds de l'empereur et meurt de chagrin.

En s’éloignant de la réalité, l’Histoire a glissé vers la légende pour glorifier les valeurs chevaleresques, la loyauté envers le suzerain et le sacrifice ultime pour la chrétienté.

 

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